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AVENTURES DU CAPITAINE HATTERAS

Les rafales ne cessèrent pas avant le lendemain ; en attelant les chiens insuffisamment nourris, Bell s’aperçut que trois d’entre eux avaient commencé à ronger leurs courroies de cuir ; deux paraissaient fort malades et ne pouvaient aller loin.

Cependant la caravane reprit sa marche tant bien que mal ; il restait encore soixante milles à franchir avant d’atteindre le point indiqué.

Le 26, Bell, qui allait en avant, appela tout à coup ses compagnons. Ceux-ci accoururent, et il leur montra d’un air stupéfait un fusil appuyé sur un glaçon.

« Un fusil ! » s’écria le docteur.

Hatteras le prit ; il était en bon état et chargé.

« Les hommes du Porpoise ne peuvent être loin, » dit le docteur.

Hatteras, en examinant l’arme, remarqua qu’elle était d’origine américaine ; ses mains se crispèrent sur le canon glacé.

« En route ! en route ! » dit-il d’une voix sourde.

On continua de descendre la pente des montagnes. Simpson paraissait privé de tout sentiment ; il ne se plaignait plus ; la force lui manquait.

La tempête ne discontinuait pas ; la marche du traîneau devenait de plus en plus lente ; on gagnait à peine quelques milles par vingt-quatre heures, et, malgré l’économie la plus stricte, les vivres diminuaient sensiblement ; mais, tant qu’il en restait au delà de la quantité nécessaire au retour, Hatteras marchait en avant.

Le 27, on trouva presque enfoui sous la neige un sextant, puis une gourde ; celle-ci contenait de l’eau-de-vie, ou plutôt un morceau de glace, au centre duquel tout l’esprit de cette liqueur s’était réfugié sous la forme d’une boule de neige ; elle ne pouvait plus servir.

Évidemment, Hatteras suivait sans le vouloir les traces d’une grande catastrophe ; il s’avançait par le seul chemin praticable, ramassant les épaves de quel-