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LE DÉSERT DE GLACE

que peu à peu ils rétréciront le cercle de leurs recherches autour du Fort-Providence.

— Nous verrons bien, répondit Altamont.

— Maintenant, continuons notre marche, dit le docteur, mais ayons l’œil au guet. »

Les chasseurs veillèrent avec attention ; ils pouvaient craindre que quelque ours ne fût embusqué derrière les monticules de glace ; souvent même ils prirent les blocs gigantesques pour des animaux, dont ces blocs avaient la taille et la blancheur. Mais, en fin de compte, et à leur grande satisfaction, ils en furent pour leurs illusions.

Ils revinrent enfin à mi-côte du cône, et de là leur regard se promena inutilement depuis le cap Washington jusqu’à l’île Johnson.

Ils ne virent rien ; tout était immobile et blanc ; pas un bruit, pas un craquement.

Ils rentrèrent dans la maison de neige.

Hatteras et Johnson furent mis au courant de la situation, et l’on résolut de veiller avec la plus scrupuleuse attention. La nuit vint ; rien ne troubla son calme splendide, rien ne se fit entendre qui pût signaler l’approche d’un danger.

Le lendemain, dès l’aube, Hatteras et ses compagnons, bien armés, allèrent reconnaître l’état de la neige ; ils retrouvèrent des traces identiques à celles de la veille, mais plus rapprochées. Évidemment, les ennemis prenaient leurs dispositions pour le siège du Fort-Providence.

« Ils ont ouvert leur seconde parallèle, dit le docteur.

— Ils ont même fait une pointe en avant, répondit Altamont ; voyez ces pas qui s’avancent vers le plateau ; ils appartiennent à un puissant animal.

— Oui, ces ours nous gagnent peu à peu, dit Johnson ; il est évident qu’ils ont l’intention de nous attaquer.

— Cela n’est pas douteux, répondit le docteur ; évitons de nous montrer. Nous ne sommes pas de force à combattre avec succès.

— Mais où peuvent être ces damnés ours ? s’écria Bell.

— Derrière quelques glaçons de l’est, d’où ils nous guettent ; n’allons pas nous aventurer imprudemment.

— Et la chasse ? fit Altamont.

— Remettons-la à quelques jours, répondit le docteur ; effaçons de nouveau les traces les plus rapprochées, et nous verrons demain matin si elles se sont renouvelées. De cette façon, nous serons au courant des manœuvres de nos ennemis. »