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LES ANGLAIS AU POLE NORD

vingtaine de mots de la langue groënlandaise, et avec vingt mots on va loin, si l’on n’est pas ambitieux.

Le gouverneur est né à l’île Disko, et n’a jamais quitté son pays natal ; il fit les honneurs de sa ville, qui se compose de trois maisons de bois, pour lui et le ministre luthérien, d’une école, et de magasins dont les navires naufragés se chargent de faire l’approvisionnement. Le reste consiste en huttes de neige dans lesquelles les Esquimaux entrent en rampant par une ouverture unique.

Une grande partie de la population s’était portée au-devant du Forward, et plus d’un naturel s’avança jusqu’au milieu de la baie dans son kaïak, long de quinze pieds, et large de deux au plus.

Le docteur savait que le mot esquimau signifie mangeur de poissons crus ; mais il savait aussi que ce nom est considéré comme une injure dans le pays : aussi ne se fit-il pas faute de traiter les habitants de « Groënlandais ».

Et cependant, à leurs vêtements huileux de peaux de phoque, à leurs bottes de même nature, à tout cet ensemble graisseux et infect qui ne permet pas de distinguer les hommes des femmes, il était facile de reconnaître de quelle nourriture ces gens-là faisaient usage ; d’ailleurs, comme chez tous les peuples ichthyophages, la lèpre les rongeait en partie, mais ils ne s’en portaient pas plus mal pour cela.