Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/215

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pas d’Hésus qu’il faut rapprocher son nom, mais de Hue[1], nom fréquent chez nous au moyen âge. Il n’en faut pas conclure, assurément, que les traditions conservées par les Triades du XVe siècle sur la migration des Kimris manquent tout à fait de fondement historique. Mais du moins est-il fâcheux que le Barde de Leconte de Lisle fasse jouer dans l’histoire des origines de sa race un si grand rôle à un personnage dont on n’avait pas encore entendu parler à l’époque où ce Barde est censé vivre.


Et maintenant sur la foi de quels auteurs Leconte de Lisle a-t-il raconté, dans la troisième partie de son poème, le massacre des druides et des druidesses par le farouche Murdoc’h ? L’île de Mona a-t-elle réellement vu se jouer une deuxième fois le drame sinistre dont nous parle Tacite au XIVe livre de ses Annales ? A-t-elle entendu de nouveau les diras preces des druides protestant contre la violation de leur asile, puis le bruit de leurs corps tombant sous les coups des ennemis de leur foi ? Ce qu’avait fait sous Néron un général romain, un prince chrétien l’a-t-il recommencé ? J’incline à croire que le poète s’est inspiré tout simplement du récit de l’historien latin et qu’il a transporté chez un personnage de son invention la furie que l’auteur des Annales nous montre chez les soldats de Suetonius Paulinus. S’il en est ainsi, on ne peut nier que l’histoire imaginée par lui ne soit du moins assez vraisemblable. Car l’île de Mona, malgré le grand carnage que les Romains y


  1. Voir Loth, les Mabinogion, p. 271.