Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/231

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femme et qu’on la brûle comme sorcière. — Triphyne invoqua le saint et, les trois plumes sortant de l’aumônière, les gardes s’envolèrent, changés en oiseaux.

Conamor tira son grand sabre et d’un seul coup fit voler la tête de Triphyne ; mais, au moment où la tête tombait à terre, les lèvres murmurèrent le nom de Gildas, et le manoir fut transformé en une vaste forêt où erraient des bêtes.

Triphyne était dans un carrefour de cette forêt, sa tête dans ses mains. Son père Guéreck et saint Gildas l’aperçurent. Le saint pria, puis, touchant la tête de sa crosse abbatiale, il la remit sur les épaules de Triphyne, qui revint à la vie, plus belle que jamais.


Bien qu’il ait appelé son héroïne Tiphaine, qu’il l’ait fait naître du chef de Vannes, qu’il l’ait mariée à un Komor (jarle de Kemper, non de Léon ou de Tréguier), et qu’il ait fait voler sa tête sous le glaive de son mari, Leconte de Lisle n’a certainement point eu l’intention de donner une nouvelle version de la légende de sainte Triphyne. C’est une tout autre histoire qu’il prétend nous raconter, et il n’a pris dans celle-là les noms de ses personnages que pour leur physionomie pittoresque. Son histoire a-t-elle, d’ailleurs, une source bretonne ? Je ne le crois pas. Je doute même qu’elle ait une source quelconque.

C’était par une nuit nuageuse. La lune par moments éclairait la tour de Komor, qui regardait la mer comme un cormoran. Au dehors, de la grêle, du vent, des houx