Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/329

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rie très primitive expliquée par une psychologie très moderne.

S’il y a probablement beaucoup de vérité dans cette conception du caractère des vieux Argiens, personne ne contestera que le poète n’ait poussé bien loin leur barbarie et que, par suite, son poème, où l’on retrouve si souvent l’accent de la véritable tragédie, ne confine parfois au mélodrame.

Quand Oreste, pour pénétrer dans le palais, a annoncé, par une ruse ingénieuse, sa propre mort, la Clytemnestre d’Eschyle conserve une attitude décente à cette nouvelle inattendue. Elle n’affecte point la douleur, mais elle ne laisse pas éclater la joie dont elle est pleine : elle se contente d’inviter le prétendu messager à entrer dans le palais, et, bien que celui-ci lui demande si elle veut qu’on lui apporte les cendres d’Oreste ou qu’on les ensevelisse dans le lieu où il est mort, elle ne donne aucune réponse ; elle annonce simplement qu’elle délibérera sur l’événement avec le maître d’Argos et avec ses amis. Chez Leconte de Lisle, le premier mot de Clytemnestre est pour refuser brutalement les cendres de son fils, et le second pour menacer sa fille :

Orestès.

Veux-tu qu’il rende l’urne où sont les cendres ?


Klytaimnestra.

                                                                              Non.
Tu diras qu’il la garde et qu’il l’ensevelisse.


Élektra.

Ô race misérable et vouée au supplice !