Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/44

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était orné de cent terrasses, et le corail se mariait aux gemmes incrustées dans ses arcades[1].


Une dernière addition, qui ne saurait étonner chez Leconte de Lisle, ajoute à la splendeur du poème de Çunacépà, et moins encore à sa splendeur qu’à sa signification : à chaque tournant de l’action, l’opulente nature indienne nous est décrite à l’un de ses moments principaux, à l’aube, en plein midi, au couchant, en pleine nuit. Magnifiques décors, qui embellissent tout et qui expliquent bien des choses. Qu’on regarde, par exemple, le tableau du triomphe de Sûryâ : quand on a vu l’astre monter, grandir, planer dans l’espace azuré, comme un bloc de cristal diaphane, et alors toute la terre, tout le ciel se taisent à la fois devant le Dieu qui brûle, n’a-t-on pas compris sous quelles influences les brahmanes se sont immobilisés dans leurs méditations ? Mais qu’on lise ensuite la description de l’aurore éveillant la terre : quand on a vu la Vierge au char de nacre s’élancer de la mer aux nuées


Dans un brouillard de perle empli de flèches d’or,


et alors tout s’éveiller et se vêtir d’une couleur divine, tout étinceler et rire, est-ce qu’on n’a pas compris pourquoi dans cette Inde, où abondent les contrastes, il y a, à côté des vieux anachorètes, si dégagés du « vain désir des aurores futures », des jeunes gens ayant tant de joie au cœur, et

aux yeux un si pur sourire ?

  1. Trad. Fauche, p. 70 et p. 74. Les mots mis en italique l’ont été par le traducteur.