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enjambées il a franchi tout l’univers : c’est donc un dieu solaire. Sa légende, depuis les Védas, a pris un magnifique développement. L’imagination populaire se le représente gracieux et souriant, pourvu de quatre bras, image du rayonnement solaire, les yeux mi-clos, la tête reposant, comme sur un oreiller, sur le serpent Cèsa, qui contient la terre et dont les sept têtes lui font un dais.

Dieu aussi bon que tout puissant, son histoire est celle des efforts qu’il a faits pour guérir la misère humaine et sauver le monde. Sans se lasser, il s’est incarné jusqu’à neuf fois pour cette œuvre de pitié : par exemple, il fut le poisson qui sauva la vie de Manu, le législateur ; il fut le sanglier qui repêcha la terre engloutie par le déluge au fond de l’abîme. En devenant populaire, « il s’est confondu avec les héros d’autres légendes dont les croyants sont venus grossir la masse de ses fidèles »[1]. Rama lui-même a fini par être une de ses incarnations.

Son histoire est contée dans six des Puranas.

Le mot « purana » est un adjectif qui signifie ancien. Les Puranas sont donc des récits du temps jadis. Ce sont des livres qui ont été faits pour la foule des croyants à l’époque où les brahmanes, menant la lutte contre les derniers sectateurs du Buddha, ont rallié sous leur drapeau les adorateurs de Visnou et ceux de Civa. On y a mis tout ce qui pouvait instruire la foule en lui plaisant : beaucoup de ces récits légendaires chers aux masses, mais aussi de larges

emprunts aux écoles qui professaient la théorie de l’Un

  1. Henry, Les littératures de l’Inde.