Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/81

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celui-ci a-t-il donc traversés ? Avide de savoir, il a beaucoup appris, beaucoup médité, tendu l’oreille au récit de beaucoup de sages ; mais de tant d’études il n’a rapporté qu’un mal intérieur, plus terrible que tous les chagrins domestiques, plus terrible que toutes les déceptions de l’amour : le doute, et il demande à Bhagavat de chasser enfin ce doute amer qui le consume.

Ce personnage s’appelle Angira. Si son nom est indien, son histoire est celle de Leconte de Lisle et de beaucoup de ses contemporains. Cependant, bien que sa physionomie soit un peu moderne, l’auteur du Bhagavata-Purana n’aurait point été surpris autrement de ses discours. Car voici comment Vyâsa lui-même, l’auteur présumé du Bhagavata-Purana[1], conte une conversation qu’il eut avec Narada :


Nârada dit : Illustre fils de Parâçara, l’âme qui anime ton corps et qui réside dans ton cœur s’y trouve-t-elle, ou non, contente d’elle-même ? Tu as désiré et tu as obtenu de posséder la science ; tu as accompli une grande merveille en composant le Bhârata, trésor de toutes les choses utiles.

Tu as désiré connaître et tu as lu le Vêda éternel ; et cependant, pourquoi te désoles-tu comme si tu n’avais pas atteint ton but ?

Vyâsa dit : Je possède en effet toutes les connaissances que tu viens d’énumérer, et cependant mon âme n’est pas satisfaite. C’est à toi qui es né du corps du Dieu qui naquit de lui-même que j’en demande la cause, que je ne puis saisir, dont le secret m’est inconnu


  1. Vyâsa passe pour être aussi le compilateur des Védas.