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jusqu’à la fin d’avril, le sol est presque toujours couvert de neige. Le vent du Nord est généralement accompagné de neige en hiver et de pluie en été. Quelquefois les vents de l’Ouest sont tellement violents qu’il est impossible de voyager ; en été, ils amènent des orages épouvantables avec grêle et tonnerre ; en hiver, de fortes tourmentes de neige. Ces tourmentes s’élèvent si subitement qu’on a à peine le temps de se mettre à l’abri ; il faut alors avoir d’excellents chevaux et une voiture solide, autrement on est exposé aux plus graves accidents.

Tout dernièrement, un blanc envoyé à la mission se perdit dans la neige deux jours et deux nuits ; il eut le nez et un doigt gelés. Sa barbe fut changée en un glaçon qui lui gela tout le bas du visage.

Au mois d’octobre 1899, il tomba beaucoup de neige ; des bergers de la Réserve furent surpris en rase campagne et sept d’entre eux périrent de froid. L’un de ces derniers, revenu à la cabane, avait allumé sa lanterne pour écrire un billet dans lequel il disait que le troupeau était à peu de distance, que lui-même se sentait épuisé, mais qu’il essaierait pourtant de le ramener. Il partit et fut trouvé mort, la lanterne à côté de lui.

Un autre fut trouvé mort assis : ses moutons lui avaient déjà rongé les moustaches, les cheveux et une partie des vêtements.

Par ces mauvais temps, le missionnaire court de grands risques quand il s’agit d’aller visiter les malades. Au lieu de rester à se chauffer près de son poêle, il lui faut affronter les plus grands froids pour ne pas laisser mourir sans sacrements les Indiens qui l’appellent. Pour ma part, je n’ai jamais hésité à remplir mon devoir, mais cela n’a pas été sans quelques mésaventures. Un jour, par exemple, surpris par une tempête, je m’égarai et restai un jour