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Page:Victor Brochard - Les Sceptiques grecs.djvu/383

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L’EMPIRISME. — PARTIE CONSTRUCTIVE.

expérimentale. Et il a eu le rare mérite de ne pas exagérer le rôle de l’expérience, d’éviter le pur empirisme. Sa méthode est celle qui éclaire et féconde l’expérience par le raisonnement, et se défie d’une vaine dialectique sans se borner à amasser des faits. C’est la vraie.


Ce que nous savons avec certitude de Ménodote et des empiriques, avons-nous le droit de l’étendre à tous les sceptiques ? La méthode que nous venons de résumer, et qui est celle des empiriques, est-elle aussi celle des sceptiques, et notamment celle de Sextus Empiricus ? Aucun doute ne peut s’élever sur ce point. Si Ménodote est médecin, il est en même temps un des chefs de l’école sceptique. Sextus Empiricus, en même temps qu’il est sceptique, est médecin. D’après son propre témoignage[1], il s’inspire de Ménodote. Son nom même indique à quelle secte il appartient. S’il lui arrive de critiquer les empiriques[2], et de se séparer d’eux pour se rapprocher des méthodiques, c’est sur un point seulement ; et d’ailleurs les méthodiques ne procèdent guère autrement que les empiriques. S’il ne décrit pas la méthode empirique dans les ouvrages que nous avons de lui, c’est que ce n’était point son sujet. Très vraisemblablement ses livres de médecine, si nous les possédions, nous montreraient que, sur les questions de méthode, rien ne sépare Ménodote et Sextus. Même, à nous en tenir aux seuls ouvrages que nous ayons, toute la théorie des signes commémoratifs, chez Sextus, est évidemment la même que celle des empiriques. Enfin, dans le livre des Hypotyposes, on trouve un très curieux chapitre[3] qui est tout imprégné de l’esprit de Ménodote : c’est celui où l’auteur montre que le seul moyen de résoudre les sophismes qui ont tant embarrassé les dialecticiens est de recourir à l’observation et à l’expérience. On nous dit[4] de même que Méno-

  1. P., I, 222.
  2. Voy. ci-dessus, p. 316.
  3. P., II, 229.
  4. Galen., Subfig., 66 ; De sectis, vol. I, p. 77.