Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/306

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encore les heures pour des habitants qui n’existaient plus. Cette scène de désolation présentait en même temps les accidents les plus bizarres. Sur le seul pan de mur qui restât d’une auberge, on lisait encore ces mots : Bon logis, à pied et à cheval ; là, des soldats abreuvaient leurs chevaux dans le bénitier d’une chapelle ; plus loin, leurs camarades y dansaient au son de l’orgue, avec des femmes du pays, que l’abandon et la misère forçaient à se prostituer aux bleus pour un pain de munition. Aux traces de cette guerre d’extermination, on eût pu se croire au milieu des savanes de l’Amérique ou des oasis du désert, lorsque des peuplades barbares s’égorgeaient avec une rage aveugle. Il n’y avait pourtant eu là, des deux côtés, que des Français, mais tous les fanatismes s’y étaient donné rendez-vous. J’étais dans la Vendée, à Cholet.

Le maître d’un misérable cabaret couvert en genêts, dans lequel je m’étais arrêté, me suggéra un rôle, en me demandant si je venais à Cholet pour le marché du lendemain. Je répondis affirmativement, fort étonné d’abord, qu’on se réunît au milieu de ces ruines, ensuite que les cultivateurs des environs eussent encore quelque chose à vendre ; mais l’hôte me fit observer