Page:Vigié-Lecocq - La Poésie contemporaine, 1896.djvu/133

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MYSTICISME — Il faut m’aimer ! Je suis l’Universel Baiser, O ma nuit claire ! tes yeux dans mon clair de lune ! ce lit de lumière et d’eau parmi la brune ! Toute cette innocence et tout ce reposoir ! Aime-moi ! ces deux mots sont mes verbes suprêmes, Car étant ton Dieu tout-puissant, je peux vouloir, Mais je ne veux d’abord que pouvoir que tu m’aimes. — Seigneur,c’est trop ! Vraiment jen’ose.Aimerqui ? Vous ? Oh ! non ! Je tremble et n’ose. Oh ! Vous aimer je n’ose. Ah î Seig-neur, qu’ai-je ? Hélas ! Me voici tout en larmes D’une joie extraordinaire : voire voix Me fait comme du bien et du mal à la fois, Et le mal et le bien, tout a les mômes charmes. Et j’aspire en tremblant. — Pauvre âme, c’est cela ! » N’est-ce pas ce Dieu qui répondait à Pascal gé- missant : « Je pensais à toi dans mon agonie, j’ai versé telles gouttes de mon sang pour toi... Con- sole-toi, tu ne me chercherais pas si tu ne m’avais déjà trouvé. » Mais l’extase mystique fi nit , comme toute chose ter- restre, par rinassouvissement. Dieu lui-même, si impossible à concevoir pour l’esprit, ne peut combler ce grand vide du cœur et des sens. Imaginer Dieu, c’est le rapetisser à notre taille, c’est en faire un être