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JOURNAL D’UN POÈTE

se présente disant : « Je peux tout, » comme Bonaparte, ou : « Je sais tout, » comme Mahomet, il est vainqueur et a déjà à moitié réussi. De là le succès de tant d’aventuriers.


La conscience publique est juge de tout. Il y a une puissance dans un peuple assemblé. Un public ignorant vaut un homme de génie. Pourquoi ? Parce que l’homme de génie devine le secret de la conscience publique. La conscience, savoir avec, semble collective et appartient à tous.


Lorsqu’un siècle est en marche guidé par une pensée, il est semblable à une armée marchant dans le désert. Malheur aux traînards ! rester en arrière, c’est mourir.


Quel intervalle sépare la curiosité qui fait accourir le peuple au passage d’un roi, ou à celui d’une girafe, d’un sauvage ou d’un acteur ? — Est-ce un cheveu ou une aiguille ?


Le célibataire ne donne point, comme le père de famille.