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maines. Pour être entendus, les vainqueurs faisaient un solécisme. Ce solécisme passait dans la langue. On oubliait la fine distinction de quo et d’ubi ; on se réduisait à ubi pour tous les cas ; on le prononçait d’abord oubi comme les Romains, car la prononciation dure plus longtemps que l’orthographe : les ignorants la répètent et la conservent.. Bientôt, par le parler bref et rapide des peuples barbares, ce terme ubi s’abrégeait d’une voyelle ; on disait oub ; arrive quelqu’un de plus délicat qui prononce où ; et vous êtes parvenu à la langue moderne ; vous êtes en France. (On rit.)

Je conclus de ce minutieux exemple, que sur tous les points de l’empire un travail à peu près semblable devait s’opérer pour mettre la langue conquérante, la langue romaine à la portée des ignorants et des étrangers ; que cette langue se simplifiait, pour être apprise ; que pour se simplifier, elle se corrompait, et, par cette décadence progressive, tendait vers la forme des langues modernes.

Une autre puissance que la conquête militaire, vint aider à la prodigieuse extension de la langue latine, et concourut à la modifier ; car ces deux choses marchèrent ensemble. Plus le latin se répandit, plus il s’altéra. L’influence