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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

les combats des Titans ou des Géants, ni l’histoire des Centaures, fictions des vieux temps, et toutes ces rixes où il n’y a rien d’utile, mais avoir toujours présente la providence des dieux. »

Ce langage n’est-il pas d’un sage et religieux réformateur, plutôt que d’un panthéiste ou d’un sceptique ? ne semble-t-il pas rentrer dans ce trésor de sentiments et d’images qui, chez les Grecs, faisaient de la philosophie même une seconde poésie ?

En recueillant ces précieux débris des âges antiques, on conçoit mieux comment, avec la subtilité des systèmes, l’émotion poétique arrivait à Lucrèce. Après Xénophane, Parménide, son disciple dans la ville d’Élée, sur la côte grecque d’Italie, n’était pas bon poëte, nous dit Cicéron, du moins pour la forme et le tour des vers. Mais la nouveauté des sujets qu’il traite élève sa pensée. Avait-il, comme l’indique un rhéteur du quatrième siècle, composé des hymnes en l’honneur de la nature, ὕμνους φυσιολογικούς, c’est-à-dire des chants de louange et d’admiration sur les éléments et les principes des choses, tels que la science novice les concevait alors ? On ne peut l’affirmer. Platon nomme d’ailleurs Parménide à côté d’Hésiode, comme tous deux ayant raconté d’anciennes histoires des dieux. Cette idée même se concilie facilement avec les débris qui nous restent d’un poëme de Parménide sur la Nature. Une partie de ce poëme avait pour objet la vérité, τὰ πρὸς ἀλήθειαν ; une