Page:Villiers de L'Isle-Adam - Contes cruels.djvu/262

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de l’eau bénite, pour les rafraîchir : puis j’éteignis la bougie et je fermai les yeux. Le sommeil s’approchait : la fièvre s’apaisait.

J’allais m’endormir.

Trois petits coups secs, impératifs, furent frappés à ma porte.

— Hein ? me dis-je, en sursaut.

Alors je m’aperçus que mon premier somme avait déjà commencé. J’ignorais où j’étais. Je me croyais à Paris. Certains repos donnent ces sortes d’oublis risibles. Ayant même, presque aussitôt, perdu de vue la cause principale de mon réveil, je m’étirai voluptueusement, dans une complète inconscience de la situation.

— À propos, me dis-je tout à coup : mais on a frappé ? — Quelle visite peut bien ?…

À ce point de ma phrase, une notion confuse et obscure que je n’étais plus à Paris, mais dans un presbytère de Bretagne, chez l’abbé Maucombe, me vint à l’esprit.

En un clin d’œil, je fus au milieu de la chambre.

Ma première impression, en même temps que celle du froid aux pieds, fut celle d’une vive lumière. La pleine lune brillait, en face de la fenêtre, au-dessus de l’église, et, à travers les rideaux blancs, découpait son angle de flamme déserte et pâle sur le parquet.

Il était bien minuit.

Mes idées étaient morbides. Qu’était-ce donc ? L’ombre était extraordinaire.