Page:Villiers de L'Isle-Adam - Contes cruels.djvu/339

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pierres brillantes. Hayëm, d’une voix très basse, chantonne un chant inconnu ! Et quand les syllabes découvrent, entre ses rouges lèvres, ses dents, celle-ci sont toutes pareilles à celles de la pâle épousée du Sir-Hasirim, blanches comme des brebis sortant du bain.

Autour de la table se tient debout, mangeant comme les pèlerins, l’assemblée étincelante des Sophêtim, patriarches de la Sagesse.

Derrière eux resplendissent les Industriels de l’or d’Ophir, les Négociants des Vingt-villes de Schabul, les Ambassadeurs de la mécontente Idumée, — les Envoyés de Zour, et le Collège des docteurs de Saddoc.

Toutes les tribus, toutes les montagnes d’Israël ont livré leurs richesses. Les grenades du mont Sanir, les gâteaux de raisins de Cypre, les grappes de troène du Galaad, les dattes et les mandragores d’En-gaddi débordent les aiguières.

Là-bas, près des gradins de cette terrasse jusqu’où montent les feuillages d’Étham, — au centre d’un groupe de guerriers du pays d’Ézion-Güéber, avec lesquels il boit, en riant, le vin de Hébron, — un élancé jeune homme à l’armure de cuir parfumé, au visage de femme et vêtu en Sar-des-cavaleries, parle, en étendant la main vers l’horizon. C’est le favori du palais de Millô, — l’ennemi ! — le futur diviseur du royaume de Dieu, le subtil Iarobëam qui doit régner sur Israël et qui, déjà, s’enquiert, sans se laisser distraire par la fête, des frontières d’Éphraïm.