Page:Villiers de L’Isle-Adam - Axël, 1890.djvu/223

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Maître Janus, avec un vague sourire familier

Si tu tiens à savoir — même ce que tu demandes — pèse, d’abord, cette question simple et secrète : Comment se fait-il que l’idée même ne te soit pas venue de me croire menacé, moi aussi, en ce danger qui vient de passer tout à l’heure autour de nous ?

Axël, surpris et pensif

C’est vrai !… — Serais-tu ?…

Maître Janus, bref

Je suis un homme qui est devant toi. — Quant à ces mots, exhumés du vieux langage hermétique, et que tu prends plaisir à réciter, ils séduisent la jeunesse de ton intelligence par le brillant de leurs sons beaucoup plus que par ce qu’ils signifient. Ils ne te suggèrent que de cérébrales sensualités. Tu es dans l’âge où le scintillement des astres dérobe, à chaque instant, le sentiment du Ciel. — Oublie plutôt des expressions qui, sur tes lèvres, sont purement verbales et dont tu ne saurais encore entendre le sens vivant. Ne joue pas avec elles. Chacune de tes paroles flotte autour de toi quelques instants, puis… te quitte.