Page:Villiers de L’Isle-Adam - Axël, 1890.djvu/65

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En conséquence, Sara, puisque, par miracle, il m’est donné de pouvoir agir, ici, d’une manière efficace et salutaire, je me saisis de la Force, au nom de Dieu, contre toi, pour te sauver de ta nature affreuse. Tu retourneras au cachot ! Tu y jeûneras jusqu’à ce que ta misérable chair, qui se révolte, soit matée. Ta beauté, c’est de l’enfer qui apparaît : tes cheveux te tentent ! tes regards sont des éclairs de scandale ! Tout cela doit s’éteindre vite et en poudroyant ; car c’est une illusion des ténèbres extérieures où tout se transforme et s’efface… j’en prends à témoin le ver de terre. Tu ne saurais te voir telle que tu es en ce moment sans mourir. — T’imagines-tu que Madeleine n’était pas aussi belle ? Sache-le bien, dès qu’elle se fut reconnue, éclairée par un regard de Dieu, la sublime pécheresse en garda toute sa vie un tremblement d’horreur. Prie, comme elle pria, pour obtenir ce qui nous éclaire ! Qu’elle soit ton exemple, jusqu’au dernier soupir ! Et tu seras notre sœur, notre sainte, notre enfant ! Un silence.

Un jour, peut-être, si ton repentir est sincère, reviendras-tu parmi nous. J’en doute ; mais mon devoir est de l’espérer… car la Miséricorde et l’Amour divins sont sans limites. Jusque-là nous prierons pour toi, jour et nuit, dans la consternation, les larmes et le jeûne ! — Moi-même, en