Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/104

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ges de l’Amérique, ces tristes horreurs sont banales, sont dans les mœurs, au point que tel civilisé qui s’en choquerait ne se ferait même pas comprendre. Elles sont dans la nature humaine, paraît-il, et, même ici, bon nombre de moralistes qui jetteraient, à ce sujet, feu et flamme laisseraient percer, à leur insu, dans leur style, on ne sait quelle jalousie de n’en avoir point tâté eux-mêmes quelque peu, faute de ressources suffisantes. Regrets qui formeraient le plus clair de leur indignation contre vos richards.

Mais une réflexion console de ces turpitudes maladives et révoltantes : c’est qu’au dire de la Science, qui le prouve, elles réussissent assez mal aux tempéraments de ceux qui s’y adonnent. Vos bons vieux millionnaires qui, pour quelques livres, s’offrent ainsi des plaisirs de césars, de radjahs et de sultans, se réveillent vite paralysés, épileptiques, ataxiques ou gâteux. Les griffes de la méningite les guettent et ils finissent, pour la plupart, à quatre pattes. Laissez-moi penser qu’ils sont en fort petit nombre et que chez vous comme ici, les gens riches se contentent de séduire les enfants sans les martyriser.

— Croyez-le… si cela vous est agréable, répliqua l’autre gentleman ; mais ces volontés ne nous semblent pas aussi révoltantes qu’elles vous le paraissent et je maintiens que Paris est en retard sur ce point. La seule chose qui m’irrite chez les miens, à Londres, ce que je voudrais démasquer, si j’en avais le loisir, c’est seulement, je vous le