Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/131

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’AGRÉMENT INATTENDU

À Monsieur Stéphane Mallarmé.


Je dirai : j’étais là ; telle chose m’advint,
Vous y croirez être vous-même !

La Fontaine, les Deux Pigeons.


Sur cette route méridionale aux poudroiements embrasés, sous le pesant soleil des canicules, je marchais, en complet blanc, sous un vaste chapeau de paille, ayant à l’épaule ce bâton du touriste auquel se nouait un petit sac de linge. Depuis trois heures de fatigue, pas une hôtellerie, pas un voyageur, pas une silhouette humaine. Tourmenté par la soif, pas une source, sous les bouquets de lentisques courts et secs des fossés vicinaux — et la plus prochaine ville, où je comptais m’arrêter une couple de jours, se trouvait distante de plus de quatre heures encore ! — Au moment donc où j’allais, en vérité, concevoir quelque inquiétude sur l’heureuse issue de mon étape, voici qu’au coude sinueux du grand chemin, j’entrevis, à quelque cent mètres, une maison blanche, isolée, aux contrevents fermés : une touffe de