UN SINGULIER CHELEM !
À Monsieur Henri Lavedan.
Svelte, en des atours surannés, d’un visage amaigri, aux traits fins et fiers sous ses cheveux blancs partagés à l’autrefois, la duchesse douairière de Kerléanor habitait, depuis de longues années de veuvage, son austère manoir breton.
L’imposante bâtisse, dominant une des grèves armoricaines, s’élevait, non loin du bourg de Carléeu, à moins d’un kilomètre des lisières de l’interminable forêt appelée « Coët-an-die, Coët-an-nôs » (bois du jour, bois de la nuit). Retirée en cet exil, la châtelaine y achevait en pieuses pratiques une vie rigide, à l’abri de toutes approches des « idées modernes ». Confondus, les vents du large et des bois, par les crépusculaires et froids corridors, se plaignaient en toute saison, soit gémissant à travers les ais rouillés de quelque armure, soit hurlant entre les cadres effacés des ancêtres et la nudité des murailles : mais ces rumeurs