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LE TZAR ET LES GRANDS-DUCS


Le couronnement prochain du Tzar me remet en mémoire un ensemble de circonstances dont la mystérieuse frivolité peut éveiller, en quelques esprits, la sensation d’une de ces correspondances dont parle Swedenborg. En tous cas, il en ressort que la réalité dépasse, quelquefois, dans le jeu fantaisiste de ses coïncidences, les limites les plus extrêmes du bizarre.

Pendant l’été de 1870, le Grand-duc de Saxe-Weimar offrit au tzar Alexandre II un festival artistique. Plusieurs souverains de l’Allemagne furent invités. C’était, je crois, à l’occasion d’un projet d’alliance entre une princesse de Saxe et le grand-duc Wladimir, frère du tzaréwitch.

Le programme comprenait une fête à Eisenach — et l’exécution des principales œuvres de Richard Wagner sur le petit théâtre, très en renom d’ailleurs, de Weimar.

Arrivé à l’Hôtel du Prince, la veille de la fête, je me trouvai placé, le soir, à table d’hôte, en face de Liszt — qui, sablant le champagne au milieu de sa cour féminine, me parut porter un peu nonchal