Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/389

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et, symbolisant ainsi l’analyse où ses pensées s’aventuraient, elle lissa, de deux de ses doigts fins et pâles, le bout de l’un de ses sourcils, en étendant l’autre main vers le brahme :

… — « en… des suppositions lointaines, motivées subtilement, et suivies d’affreux silences… Puis, — des inflexions, très singulières, de ta voix, éveillent… on ne sait quelles angoisses — dont tu épies, sans trêve, l’ombre passant sur les fronts. Alors — mystère de toute raison vaincue ! — d’étranges consonnances [sic], oui, presque nulle de signification, — et dont les magiques secrets te sont familiers, — te suffisent pour effleurer nos esprits d’insaisissables, de glaçantes inquiétudes ! de si troubles soupçons qu’une anxiété inconnue oppresse, bientôt, ceux-là mêmes dont la défiance, en éveil, commençait à te regarder fixement. Il est trop tard. Le verbe de tes lèvres revêt, alors, les reflets bleus et froids des glaives, de l’écaille des dragons, des pierreries. Il enlace, fascine, déchire, éblouit, envenime, étouffe… et il a des ailes ! Ses occultes morsures font saigner l’amour à n’en plus guérir. Tu sais l’art de susciter — pour les toujours décevoir — les espérances suprêmes ! À peine supposes-tu… que tu convaincs plus que si tu attestais. Si tu feins de rassurer, ta menaçante sollicitude fait pâlir. Et, selon tes vouloirs, la mortelle malice qui anime ta sifflante pensée, jamais ne louange que pour dissimuler les obliques flèches de tes réserves, qui, seules, importent ! — tu le sais, car tu es comme un mort méchant. D’un flair louche et froid, tu