Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/68

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ressources de leur art. — La nomenclature des forfaits de ce Mahoin défrayait les veillées et, comme la plupart des gendarmes belges renonçaient à le surprendre hors de ses repaires inconnus, le scélérat, terreur du pauvre et du riche, faisait trembler, à vingt lieues à la ronde, chaumières, couvents, maisons de plaisance et châteaux. — De très jeunes filles, bourgeoises et villageoises, en crise de puberté, le désiraient, — entre autres envies morbides, — quitte à s’étonner, une fois muées, de tout ce nauséeux amas d’appétits dont elles s’étaient senties tourmentées. Seulement, le monstre avait conscience exacte de ces crises, qu’il guettait. Et, donc, il s’était diverti, depuis dix ans, dans les fossés, dans les bois, dans les luzernes, avec une trentaine, à peu près, de ces infortunées. L’on comptait, également, à son acquit, une forte douzaine de meurtres, commis avec des circonstances de barbarie surprenantes, d’une hideur inouïe ; des effractions d’une audace hors ligne, d’innombrables larcins — des viols de différents genres, d’une luxure à ce point révoltante que le huis-clos même en eût peut-être refusé les révélations (bien qu’il soit de notoriété que, par tous les pays, la magistrature est friande, en général, de récits égrillards) ; enfin, — et c’est ce qui fit déborder la coupe de la fureur publique, — des détournements continuels de vases sacrés, opérés avec bris de tabernacles, strangulation des bedeaux, — suivie de profanations exercées sur leurs cadavres ; — etc.