Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/77

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qu’elles entraînent. Imbus d’un atavisme qui, en réalité, commençait à dieu, ils se fussent (oh ! même affamés !) refusés, d’instinct, certes ! à céder, malgré l’exemple, les droits sacrés de leur aînesse consciente contre toutes les pâtées de lentilles vénéneuses dont un périssable Actualisme eût tenté de séduire leur inanition. Quant à cet Avenir, dont une église de rhéteurs têtus prophétisait la perdurable et sublime rutilance, ces deux jeunes gens hésitaient à s’infatuer au point de par trop oublier, aussi, qu’en fin de compte, ( — ne fût-ce qu’au témoignage criard de ces vingt-six changements à vue dont ne cesse de nous assourdir, sous nos pieds, la menaçante géologie — et en passant même sous silence les fort troublantes révélations de l’astronomie moderne, — ) l’univers attesta, maintes fois, inopinément, être une salle trop peu sûre pour que l’on dût caresser une minute l’idée de jamais pouvoir s’y installer définitivement.

En sorte que tout le clinquant intellectuel de la Science, toutes les boîtes de jouets dont se paye l’âge mûr de l’Humanité, tous les bondissements désespérés des impersuasives métaphysiques, tout l’hypnotisme d’un Progrès — si magnifiquement naturel, éclairé par la providence d’un Dieu révélé et, sans lui, d’une vanité si poignante, — non, tout cela ne leur paraissait pas aussi sérieux, ni aussi utile, en substance, que le tout simple et natal regard de l’Homme vers le Ciel.

Socialement, toutefois, il leur était difficile, en eux-mêmes, de condamner, à l’étourdie, l’évidence