Page:Villiers de L’Isle-Adam - Le Nouveau-Monde, 1880.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ACTE PREMIER SCENE II Lady CECIL, MARY, puis la Voix du Chevalier DE VAUDREUIL Lady CECIL, a demi-voix, accoudée au balcon Ils s’expatrient !... Ils s’en vont !... Ils peuvent partir ! — beau vaisseau ! Tu te nommes l'Espérance... Oui, c’est vers un nouveau monde que tu appareilles !... Tu emportes des cœurs fatigués ; — tu vas partir pour une jeune terre aux savanes couvertes de fleurs inconnues et qui m’apparaît dans une brume de diamants !... Ici, s’étendent des cieux parsemés d’étoiles nouvelles et que refléchissent de grands lacs, miroirs des filles sauvages qui en comprennent le murmure !... Je t’envoie ce baiser, beau vaisseau ! Que le vent des traversées heureuses te l’apporte et enfle tes voiles ! Envole-toi vers ces pays où les grandes forêts vierges se prolongent au bord des fleuves !... Attéris à ces rivages en- chantés, houles de parfums et de feuillages, où, perdus dans les ixias et les lianes, chantent, ivres de gouttes de rosée, la non-pareille des Florides, les pluviers de Virginie et les divins rossignols !... Mary, qui s’est approchée, sourieuse, sur la pointe des pieds Et beaucoup d’autres oiseaux !... Lady CeCIL, se détournant, souriante Tu m’écoutais, folle ? MARY, lui nouant les bras autour du cou Qui veux-tu que j’écoute, si ce n’est toi ? Je t’aime tant que tes soucis les plus cachés, — ceux que tu n’oses me dire à moi-même, — je les devine ! Lady Cecil Tu es mon seul souci, Mary ; je n’en ai point d’autres.