Page:Villiers de L’Isle-Adam - Le Nouveau-Monde, 1880.djvu/41

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LE NOUVEAU-MONDE 28 je donne. — A Florence, on m’accusait d’être italienne pour le compte du gouvernement russe ; on se trompait. Je suis écossaise. Je vais volontiers devant moi, sans songer au pays de la veille. J’ai aimé quelquefois, en route, peut-être. Enfin, je suis, je pense, une voyageuse... (Un mouvement de lord Cecil) — une aventurière ? Soit. (Elle se lève : d’un ton grave.) Eh bien, monseigneur, il est, de par le monde, au delà de la mer, que je viens de traverser, un lieu maudit et en- chanté d’où mon esprit ne s’éloignera plus , — car c’est là que j’aime un homme qui ne m’aime pas ! Là, j’ai connu le supplice des paroles amies, les froids étonnements, les attitudes d’étranger ! Oh ! celui ou celle qui tente l’amour devant ces accueils, mérite le désespoir et l’obtient toujours. (Avec violence.) Mais, du moins, l’absente, qui était presque une morte pour lui, ne ressuscitera pas, et jamais Ruth Moore... Lord CECIL, se levant Qu’avez -vous dit ! Mistress Andrews Ce que vous deviez apprendre. — Monseigneur, vous avez fait au monastère de Rossmore une libéralité qui ne servira qu’au salut de votre âme,— car ce n’est point pour s’enfermer dans un cloître que votre femme vous demande sa liberté... mais pour aller rejoindre sir Stephen Ashwell, qu’elle aime. Lord CECIL, se contenant Prenez garde. Mistress Andrews Or, je ne veux pas que Stephen la revoie !... Vous la re- tiendrez, je pense. Lord CECIL, bas, et après un regard autour de lui Ah ! des preuves, sinon...