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[chœur]
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couvert de figures d’ivoire entremêlées d’animaux de cuivre ; ouvrage admirable, prétend-il, donné par Suger, et que les huguenots détruisirent[1]. Avant le sacre et couronnement de la reine Marie de Médicis, le chœur de Saint-Denis n’avait toutefois subi aucune modification importante. Des deux côtés, soixante stalles hautes et basses, richement sculptées et garnies de dossiers en étoffe, s’adossaient aux piliers de la nef. À l’extrémité des stalles, d’un des gros piliers de la croisée à l’autre, une trabes traversait le chœur ; cette poutre était peinte d’azur, semée de fleurs de lis d’or ; une croix d’or, que l’on prétendait avoir été fabriquée par saint Éloy, s’élevait au milieu de sa portée. Entre les stalles était le lutrin de bronze donné par le roi Dagobert et provenant de l’église Saint-Hilaire de Poitiers. Ce pupitre était soutenu par les quatre figures des Évangélistes, également en bronze. En remontant vers l’autel, dans l’axe du chœur, on voyait le tombeau de Charles le Chauve, en cuivre émaillé, porté sur quatre lions, et ayant, à chaque angle, un des quatre docteurs de l’Église. Le pavé était magnifique, en marbre blanc, noir, vert antique, jaspe et porphyre ; c’était probablement une de ces mosaïques connues en Italie sous le nom d’opus Alexandrinum. À l’extrémité orientale du chœur, au-delà de la croisée dans la première travée du sanctuaire, s’élevait l’autel de la Trinité, dit autel matutinal, en marbre noir, enrichi de figures en marbre blanc représentant le martyre de saint Denis ; on couvrait son retable de pierre d’un magnifique retable d’or aux fêtes solennelles (voy. Autel, fig, 7). Une grille de fer, placée au-devant de l’autel matutinal, au droit des deux premiers piliers de l’abside, formait un premier sanctuaire inférieur. Derrière l’autel, on apercevait la châsse de saint Louis, ouvrage d’argent et de vermeil. Des deux côtés, deux rampes étroites montaient au sanctuaire supérieur. Quatre colonnes d’argent portant les anges céroféraires accompagnaient ces rampes et servaient à suspendre, au moyen de tringles, les voiles de l’autel matutinal. Le sanctuaire supérieur était clos par des grilles de fer forgé, dont il reste des débris admirables. Au fond de l’abside, les châsses de saint Denis et de ses deux compagnons étaient placées sous un édicule d’un travail précieux, accompagné d’un grand autel antérieur (voy. Autel, fig. 6). Entre les stalles et l’autel de la Trinité, saint Louis avait fait placer un grand nombre de tombes des princes ses prédécesseurs, en respectant probablement les anciennes places occupées par leurs restes. Le tombeau de Dagobert, monument d’une grande importance, également refait du temps de saint Louis, était placé à côté de l’autel matutinal (côté

  1. Il faut observer toutefois que le jubé avait dû être rebâti sous le règne de saint Louis, avec la nef, la croisée et une partie du sanctuaire. Il faut donc supposer que ces images dont parle D. Doublet auraient été reposées sur le jubé du XIIIe siècle. Le fait n’a rien d’ailleurs de contraire aux habitudes de cette époque, souvent les constructeurs du XIIIe siècle replacèrent dans leurs monuments des bas-reliefs d’une époque antérieure.