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[étuve]
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chambres sises derrière l’Hôtel-Dieu, entre le monnayeur et les bains, inter monetarium et balnea. Il est probable que ces bains, qui occupaient l’emplacement où l’on voit encore le gracieux hôtel des Lions, étaient les seuls qu’il y eût primitivement à Provins, et leur ancienneté leur avait fait donner le nom de vieux-bains. Ils tombaient en ruines en 1356. Louis-le-Hutin en établit de nouveaux en 1309 à cause de l’affluence du peuple, ob affluentiam populi, dit Moissant[1] ; mais cette affluence ne fut pas de longue durée, car nous voyons quelque temps plus tard le louage des bains diminuer d’année en année d’une manière sensible[2]. »

Ces étuves ne consistaient qu’en des chambres plus ou moins spacieuses dans lesquelles on disposait des cuves remplies d’eau tiède au moyen de conduites, comme cela se pratique encore aujourd’hui. Dans les palais, les salles de bains étaient décorées souvent fort richement. Sauval[3] rapporte qu’à l’hôtel Saint-Pol, et à l’hôtel du Petit-Muce, le roi Charles V avait fait disposer pour la reine des chambres de bains qui étaient pavées de pierres de liais, « fermées de portes en fer treillisé, et entourées de lambris de bois d’Irlande ; les cuves étaient de même bois, ornées tout autour de bossettes dorées, et liées de cerceaux attachés avec des clous de cuivre doré. »

Depuis le XIVe siècle, dit ailleurs le même auteur[4], « nos rois bâtirent des étuves à la pointe de cette isle (du Palais)[5], et pour celles firent faire un logis nommé la maison des Étuves, tant pour eux et pour leurs enfans que pour les princes et autres grands seigneurs logés avec eux ; car en ce temps-là il y en avoit non-seulement dans tous les palais et les grands hôtels, mais même dans plusieurs rues de Paris, destinées exprès pour cela ; d’où vient que quelques-unes conservent encore ce nom de rue des Étuves… Pour ce qui est des Étuves de cette Isle, elles furent données par Henri II aux ouvriers de la Monnoie, au moulin qu’il fit fabriquer en cet endroit-là, mais qu’on ruina lorsqu’on entreprit le Pont-Neuf. »

Chez les particuliers on avait des cuviers qui servaient de baignoires et que l’on plaçait dans une chambre lorsqu’on voulait se baigner ; on appelait cela tirer le bain… « Il fit tantost tirer les bains, chauffer les estuves. » On prenait même parfois ses repas étant ainsi au bain : « Tantost se bouterent au bain, devant lequel beau souper fut en haste couvert et servi[6]. »

  1. « En 1309, on fait le pavement des bains avec des pierres de Paris, on appareille fournel, chaudières et étuves. »
  2. « En 1311, les bains-neufs sont loués 240 livres ; en 1315, 100 ; en 1320, 60 ; en 1325, 95. »
  3. Hist. et antiq. de la ville de Paris, t. II, p. 280.
  4. Ibid., t. I, p. 99.
  5. Vers le terre-plein du Pont-Neuf.
  6. La Médaille à revers. (Cent nouvelles nouvelles.)