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[meneau]
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meneaux verticaux G, son axe étant en M. L’appareilleur n’a pas ici cherché des coupes savantes pour assembler les morceaux de la claire-voie. Celle-ci ne se compose réellement que de trois linteaux ajourés, superposés, dont on voit les lits en LL′L″, les branches d’arcs O faisant partie de ces linteaux. On reconnaît encore cependant que l’architecte, par la disposition des arabesques, a voulu donner de la résistance aux points faibles des évidements. Les figurines, les enroulements n’existent qu’en dehors du vitrail, les panneaux de verre étant enchâssés dans les compartiments principaux. La colonnette K même ne porte que la demi-épaisseur des meneaux et n’existe que du côté du dehors. En A est tracée la section sur ab et en B la section sur cd. La partie la plus délicate de cette claire-voie n’est guère qu’une décoration extérieure qui ne maintient en aucune façon les panneaux de verre, mais qui cependant donne un peu plus de solidité à l’ouvrage. Ces meneaux produisent un assez bon effet et sont exécutés avec une finesse et une perfection remarquables. Les soffites rampants sous les corniches et frontons sont ornés de gravures délicates. Le système de linteaux ou d’assises ajourés adoptés ici ne pouvait convenir qu’à des fenêtres assez étroites, puisqu’il interdisait les joints verticaux. Dans la même église, les claires-voies des fenêtres ayant trois meneaux et quatre travées sont combinées dans le genre de celles données précédemment, fig. 10.

Les fenêtres de l’architecture civile possédaient aussi des meneaux, lorsqu’elles étaient d’une trop grande largeur pour qu’il fût possible de ne les fermer qu’avec un seul ventail (voy. Fenêtre, fig. 29, 31, 32, 33, 35, 36, 37, 38, 40, 41 et 42). Ces meneaux, jusqu’à la fin du XIIIe siècle, ne consistent habituellement qu’en une colonnette soulageant le linteau. Les architectes déployaient un certain luxe de sculpture dans les meneaux de palais et quelquefois même ornaient leurs fûts de figures, en manière de cariatides. Nous avons retrouvé à Sens un très-beau meneau de ce genre qui date du XIIe siècle (12)[1]. La statuette adossée à la colonne à section octogonale formant le corps du meneau représente la Géométrie ou l’Architecture ; elle tient un grand compas d’appareilleur. En A est tracée la section du meneau faite sur ab, et en B le côté du meneau avec le renfort postérieur destiné à recevoir les targettes. Dans la section A, nous n’avons pas indiqué par des hachures la coupe de la figure afin de laisser voir celle de la colonnette dans le fût de laquelle s’engage la statue. Sur la partie inférieure des meneaux des fenêtres hautes de la cathédrale de Nevers, à l’extérieur, on remarque aussi des statuettes adossées aux fûts des colonnettes centrales.

À l’époque de la Renaissance, on voit aussi des meneaux en forme de cariatides, ou de gaînes surmontées de bustes. Ce ne fut guère que sous le règne de Louis XIV que l’on renonça définitivement aux meneaux ; on

  1. Cette colonnette, qui servait de meneau à une fenêtre, est placée aujourd’hui à l’une des baies du rez-de-chaussée de la salle synodale de Sens.