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cles, on emploie souvent le sable de plaine, très-rarement le gros gravier ; les mortiers sont parfaitement corroyés, la chaux bien cuite et bien éteinte. Mais alors le sable de plaine employé paraît avoir été lavé, car il ne contient pas d’argile. Il n’y a que dans certaines parties de la Picardie où le sable argileux de plaine ait été employé sans lavage pour faire du mortier, et bien que ces mortiers aient acquis de la dureté, ils sont toujours gercés dans les blocages et ne présentent pas une masse parfaitement compacte.

Les constructeurs ont employé la chaux telle que pouvaient la leur fournir les calcaires dont ils disposaient. Ces chaux sont hydrauliques dans les contrées où la pierre à chaux possède cette qualité, grasses dans les pays où la pierre à chaux ne contient que très-peu d’argile. Ils ne connaissaient pas, par conséquent, la chaux hydraulique factice. Mais leurs chaux grasses ont, à dater de la fin du XIIe siècle, acquis une très-grande dureté, même en fondation, ainsi que nous avons pu le reconnaître dans les substructions des cathédrales de Reims, d’Amiens, de Paris, de Sens, etc.

Il faut dire qu’à cette époque, c’est-à-dire au commencement du XIIIe siècle, des raisons d’économie forçaient quelquefois les constructeurs à n’employer que très-peu de chaux dans leur mortier et du sable comme on le trouvait. Les mortiers dans la construction des cathédrales de Laon, de Troyes, de Châlons-sur-Marne, de Séez sont très-mauvais. Mais nous avons donné ailleurs les raisons qui avaient fait élever ces édifices avec une extrême économie (voy. cathédrale, construction).

MOSAÏQUE, s. f. Ouvrages faits de petits cubes de pierres dures ou de pâtes de verre de diverses couleurs, collés sur les parements des monuments ou sur les aires au moyen d’un ciment composé de chaux, de sable très-fin, de pouzzolane ou de brique pilée. Les Romains des bas temps ont employé la mosaïque non-seulement pour décorer les aires des salles, mais aussi pour tapisser les murs. Il n’est pas nécessaire ici de répéter ce qui a été écrit sur ce sujet. Il nous suffit de constater que la mosaïque était fort souvent appliquée dans les monuments de l’époque mérovingienne en Occident. Grégoire de Tours parle des mosaïques qui décoraient plusieurs églises de son temps. Saint Pallade, évêque d’Auxerre, fit élever au VIIe siècle le monastère de Saint-Eusèbe ; l’abside de l’église était décorée de mosaïques dans lesquelles l’or entrait pour une grande partie[1]. En effet, le travail de mosaïque, auquel on donne le nom de byzantin, se compose de fonds d’or obtenus au moyen de petits cubes de pâtes de verre dorés et recouverts d’un émail transparent. Les sujets, les ornements se détachent sur ces fonds d’or. Ces sortes de mosaïques, très-répandues en Italie, en Sicile et en Orient, sont très-rares en France, puisque nous n’en connaissons qu’un seul exemple

  1. L’abbé Lebeuf. Mémoires concernant l’hist. civile et ecclésiastique d’Auxerre, t. I, p. 149.