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(voy. Pilier ). À Vézelay même, dans la nef, au-dessus des archivoltes des bas côtés, des pilastres portent les formerets de la grande voûte, tandis qu’on ne voit jamais de pilastres employés dans les édifices romans de l’Île-de-France. Le pilastre est quelquefois employé aussi dans certains monuments romans de la Provence, et il est habituellement cannelé. De fait, dans l’architecture française du moyen âge, le pilastre est une exception, son emploi est dû à la présence de monuments romains voisins.

PILE, s. f. Voy. Pilier.

PILIER, s. m. Support vertical de pierre isolé, destiné à porter les charpentes ou les voûtes des édifices. Le pilier appartient à l’architecture du moyen âge. Les Grecs ni les Romains n’élevaient, à proprement parler, de piliers, car ce nom ne peut être donné à la colonne non plus qu’à ces masses épaisses et compactes de blocages qui, dans les grands édifices romains, comme les salles des Thermes, par exemple, supportent et contre-butent les voûtes. Le pilier est trop grêle à lui seul pour résister à des poussées obliques ; il faut, pour qu’il puisse conserver la ligne verticale, qu’il soit chargé verticalement, ou que les résultantes des poussées des voûtes agissant sur lui se neutralisent de manière à se résoudre en une pression verticale. Lorsque les nefs d’églises, les salles, étaient couvertes par des charpentes, il n’était pas besoin de donner aux piliers une force extraordinaire, et de chercher, par la combinaison de leur section horizontale, à résister aux pressions obliques des voûtes ; mais dès que l’on prétendit substituer la voûte aux charpentes pour fermer les vaisseaux, les constructeurs s’ingénièrent pour donner aux piliers des formes propres à remplir cette nouvelle destination. Ils augmentèrent d’abord démesurément le diamètre de la colonne cylindrique, puis ils groupèrent plusieurs colonnes ; puis ils cantonnèrent les piliers à section carrée de colonnes engagées ; ils cherchèrent ainsi des combinaisons résistantes jusqu’au moment où l’architecture adopta, vers le milieu du XIIe siècle, un système de structure entièrement nouveau. Alors le pilier ne fut plus que le dérivé de la voûte ou de la pression agissant sur lui.

Mieux que tout autre membre de l’architecture, le pilier, pendant le moyen âge, exprime les essais, les efforts des architectes et les résultats logiques des principes qu’ils admettent au moment où l’art vient aux mains des écoles laïques ; aussi devrons-nous entrer dans des explications assez étendues à propos des curieuses transformations que subit le pilier du Xe au XVe siècle.

Dans la basilique romaine, le pilier n’est autre que la colonne portant un mur vertical, soit au moyen de plates-bandes, soit au moyen d’arcs. Sur deux rangs de colonnes s’élevaient deux murs ; sur ces deux murs, de l’un à l’autre, une charpente. Pression verticale, assez faible d’ailleurs, par