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il y a vingt ans, de présenter un véritable intérêt ; il a été démoli sans raison sérieuse et remplacé par un pont suspendu qui, bien entendu, devra bientôt être refait, la durée de ces sortes de ponts ne dépassant guère un demi-siècle.

Nos vieilles villes françaises, qui la plupart présentaient, il y a peu de temps, un caractère particulier, et qu’on aimait à visiter ainsi parées encore de leurs monuments, ont laissé détruire, sous l’influence d’un engouement passager, bien de précieux débris. Espérons que leurs conseils municipaux, mieux instruits de leurs véritables intérêts, conserveront religieusement les restes de leur ancienne splendeur, respectés par le temps, quand ces restes d’ailleurs ne peuvent en aucune façon entraver les développements de l’activité moderne, et sont un attrait pour les voyageurs. L’arc romain de Saintes, si précieux sur le pont, fait aujourd’hui sur la rive la plus étrange figure, et semble être un édifice échoué là par hasard.

La ville de Cahors n’a heureusement pas encore détruit son merveilleux pont de la Calendre, l’un des plus beaux et des plus complets que nous ait légués le XIIIe siècle. La construction du pont de la Calendre remonte à l’année 1251, et mérite une étude spéciale. Ce pont se reliait aux murailles de la ville, commandait le cours du Lot, et battait les collines qui sont situées sur la rive opposée. La ville de Cahors possédait trois ponts à peu près bâtis sur le même modèle ; le pont de la Calendre est celui des trois qui est le mieux conservé. Il se compose de six arches principales en tiers-point, fort élevées au-dessus de l’étiage. Sur la pile centrale et les deux piles extrêmes (fig. 5), s’élèvent trois tours : celle du centre carrée et les deux extrêmes sur plan barlong. Du tablier du pont des escaliers crénelés permettent de monter au premier étage de ces tours. La ville est située en A. Sur la rive opposée en B se dressent, abruptes, des collines calcaires assez hautes. On arrivait au pont latéralement, en suivant le cours du Lot, soit en amont, soit en aval, ainsi qu’on le voit en C. Il fallait alors franchir une porte défendue par un châtelet D, qui commandait la route et les escarpements inférieurs de la colline B. Cette porte double donnait entrée à angle droit sur le tablier du pont, en avant de la première tour E. Les parapets de cette première travée étaient crénelés, et communiquaient, d’un côté, par un escalier également crénelé F, avec les défenses supérieures du châtelet. Il fallait alors franchir la tour E, bien défendue dans sa partie supérieure par des mâchicoulis, et par une porte avec mâchicoulis intérieur. La porte E franchie, on entrait sur la première moitié du pont commandée par la tour centrale G, à laquelle on montait par un escalier contenu dans un ouvrage construit sur l’un des avant-becs. Cette tour centrale était de même fermée par une porte. Celle-ci franchie, on entrait sur la seconde moitié du tablier, commandée par la troisième tour H, munie à son sommet de mâchicoulis. Du côté de la ville une dernière porte I défendait les approches de cette troisième tour, à laquelle on montait par un escalier