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par un pont fixe, de bois, jeté sur un large fossé plein d’eau, et un pont-levis. Cette entrée était flanquée de deux grosses tours, puis s’élevait au delà la tour du coin, surmontée d’une guette très-élevée qui permettait de voir tout ce qui se passait dans le châtelet et au dehors. La porte du château et ses ouvrages de défense commandaient absolument le châtelet à très-petite portée[1].

Portes de donjons. Poternes. — Les donjons possédaient des portes défendues d’une façon toute spéciale. Ces portes étaient souvent relevées au-dessus du niveau du sol extérieur, afin de les mettre à l’abri d’une attaque directe ; des échelles de bois étaient alors disposées par la garnison pour pouvoir entrer dans ces réduits ou en sortir. Mais on comprend que cette disposition présentait de graves inconvénients. Si les défenseurs du château ou de la ville étaient obligés de se réfugier précipitamment dans le donjon, ce moyen d’accès était insuffisant, et il advenait (comme cela s’est présenté pendant la dernière phase du siége du château Gaillard par Philippe-Auguste[2]) que les défenseurs, pris de court, n’avaient pas le temps de rentrer dans le réduit. Aussi chercha-t-on à rendre les portes de donjons aussi difficiles à forcer que possible, en laissant aux assiégés les moyens de se réfugier en masse serrée dans la défense extrême, s’ils étaient pressés de trop près. Beaucoup de donjons possédaient deux poternes, l’une apparente, l’autre souterraine, qui communiquait avec les dehors, de telle sorte que si une garnison pensait ne pouvoir plus tenir dans la place, soit par suite de la vigueur de l’attaque, soit par défaut de vivres, elle pouvait se dérober et ne laisser aux assaillants qu’une forteresse vide. Les gros donjons normands sur plan-carré étaient habituellement ainsi disposés[3]. Mais cependant, une fois les garnisons enfermées dans leurs murs, il leur devenait bien difficile de les franchir devant un ennemi avisé, soit pour s’échapper, soit pour tenter des sorties offensives, car les poternes souterraines n’étaient pas tellement secrètes que l’assiégeant ne pût en avoir connaissance, et les portes relevées au-dessus du sol extérieur étaient difficiles à franchir en présence de l’assiégeant. Ces problèmes paraissent avoir préoccupé le constructeur de l’admirable donjon de Coucy. Ce donjon possède une porte percée au niveau de la contrescarpe du fossé creusé entre la tour et sa chemise, et une petite poterne relevée au niveau du chemin de ronde de cette chemise, chemin de ronde qui est mis en communication, par un escalier, avec une poterne aboutissant aux dehors de la place[4]. La porte du donjon de Coucy, percée à rez-de-chaussée, est combinée avec un soin minutieux ; elle permet à la garnison, soit de franchir rapidement ce fossé, soit de descendre sur

  1. Voyez Topographie de la Gaule, Mérian.
  2. Voyez Château.
  3. Voyez Donjon.
  4. Voyez Château.