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Sauveur, dont les bras sont tournés vers le ciel. Quatre figures d’anges président, deux à droite, deux à gauche, à cette scène. Les douze apôtres sont sculptés sur le linteau et tournent la tête vers le Christ. Deux anges terminent, à droite et à gauche, cette série. À la droite du cintre est incrustée la statue de saint Pierre foulant sous ses pieds Simon le Magicien, accompagné de deux démons. À la gauche, la statue de saint Paul prêchant. Deux petites figures au-dessus de sa tête semblent écouter. Sous ses pieds sont placés deux dragons, puis deux autres figures assises sur des lions. Des quatre colonnes logées dans les ébrasements, deux sont de marbre ; ce sont celles qui sont voisines des pieds-droits. Les chapiteaux, les cordons, les corbeaux portant le linteau et la corniche, sont très-finement sculptés et d’un style remarquable. Mais nous parlerons ailleurs de cette école des sculpteurs toulousains[1], si brillante au XIIe siècle, et qui s’éteignit brusquement pendant les croisades contre les Albigeois, pour ne plus reparaître avec quelque éclat que vers la fin du XVe siècle.

Les exemples que nous venons de donner des portes d’églises appartenant à quelques-unes des principales écoles romanes de France, qu’elles soient ou non pourvues de linteaux, partent tous d’un même principe de structure, simple, rationnel et qui demande à être expliqué.

Une épaisseur de mur étant donnée, lorsque les architectes du XIIe siècle voulaient y percer une porte principale, l’ébrasement intérieur et l’épaisseur du tableau étant réservés, il restait une certaine épaisseur de mur dont on profitait pour placer une, deux, trois, quatre colonnes et archivoltes, et même plus ; ces colonnes variant de 0m, 33 (un pied) de diamètre à 0m, 16 (six pouces), on procédait de cette façon (fig. 60). A étant le tableau, on lui laissait un champ de face a, puis, prenant la largeur BC pour la base en partie engagée, on traçait la colonne D. On faisait CB′ égal à CB. On recommençait l’opération de B′ en E, et de E en F, comme ci-dessus, et ainsi autant de fois que l’épaisseur du mur l’exigeait. Alors les carrés CBB′b, B′EFe donnaient la projection horizontale des tailloirs des chapiteaux sous leur saillie.

Cette succession de carrés donnait la trace des sommiers des archivoltes, tracés en P ; ces archivoltes se recouvrant pour former un arc plus ou moins profond en décharge. Les colonnettes étaient posées en délit et monolithes, indépendantes de la bâtisse. Ainsi les nus des tailloirs des chapiteaux et les plinthes des bases, suivaient exactement les nus de la maçonnerie pleine, et chaque rangée de claveaux venait reposer sur les colonnettes. Les charges étant reportées sur les parties maçonnées BCB′EF, etc., il n’y avait alors aucune rupture à craindre. Plus tard, vers la fin du XIIe siècle, lorsque les archivoltes furent allégies et décorées de figures, on procéda d’après le même principe. Seulement, les colonnettes s’amaigrirent, les tailloirs s’obliquèrent souvent, suivant l’ébrase-

  1. Voyez l’article Statuaire.