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l’ocre rouge sont deux couleurs de la même famille, pour ainsi dire, qui s’harmonisent toujours sans difficultés. Que vous peigniez un ornement jaune sur brun rouge, ou brun rouge sur fond jaune, quelle que soit la forme ou la dimension de l’ornement, celui-ci ne fera jamais tache ; mais si vous rehaussez l’ornement jaune ou brun rouge de filets noirs ou blancs, vous obtenez alors des effets d’une extrême finesse et riches de ton. Cette observation peut être faite dans les salles du donjon du château de Coucy. La décoration peinte de la salle du rez-de-chaussée ne consiste guère qu’en un appareil tracé en blanc avec filets brun rouge sur un fond d’ocre jaune. Les formerets de la voûte se composent (voyez leur section en A, fig. 7) d’un retour d’équerre avec ornement courant de a en b et de b en c, puis d’un profil dont les membres sont alternativement peints en brun rouge et en ocre jaune. Nous donnons en B, B′, B″, trois échantillons de ces ornements courants sur les deux faces en retour d’équerre. Celui B est brun rouge sur fond ocre, avec larges filets noirs sur les rives des feuilles, et trait blanc à une égale distance du bord, à cheval sur le filet noir. Celui B′ est jaune foncé (ocre jaune mêlé d’ocre rouge) sur fond ocre jaune redessiné de filets brun rouge très-sombre et de traits blancs à l’intérieur ; des pois blancs sont de plus marqués sur le fond jaune ; celui B″ est brun rouge redessiné d’un filet blanc sur fond jaune avec tiges G gris ardoise. L’effet de cette ornementation est des plus brillants. Il va sans dire que le même ornement se retrouve à chaque formeret sur les deux faces ab, bc, et se double. Quelques tons verts se voient sur les chapiteaux de cette salle et des tons vermillon sur les nervures des voûtes, mais il y a absence de bleu, le gris remplaçant parfois cette couleur. Le vert et le gris ardoise entrent sans difficultés dans cette harmonie simple, et il semble que les artistes du XIIe siècle et du commencement du XIIIe aient reculé devant l’emploi du bleu, qui, comme nous le disions tout à l’heure, exige immédiatement l’application de tons variés entre le bleu et le rouge, ou le bleu et le jaune. Il existe, dans l’édifice connu à Poitiers sous le nom de temple de Saint-Jean, des peintures du XIIe siècle qui présentent les combinaisons les plus riches de l’harmonie simple. L’une des faces de la salle principale présente avec des figures colorées en jaune, en brun rouge clair, en vert, en gris vert et gris ardoise, des litres dont nous donnons (fig. 8) deux échantillons. Celle A forme la frise supérieure sous la charpente, celle B tient lieu d’appui relevé sous les fenêtres. La litre A est composée d’un méandre obliqué, coloré en brun rouge, en ocre jaune et en vert sur fond blanc laiteux. Un filet blanc forme la rive antérieure du méandre. Chaque ton du méandre est modelé au moyen de hachures parallèles d’un ton plus sombre, et d’autant plus larges qu’elles s’approchent du bord postérieur de chaque face oblique. Les tons sont marqués ainsi : le brun rouge par la lettre R, le jaune J, le vert V, le gris ardoise BG. Les oiseaux sont brun rouge et jaune. Les points blancs sont piqués régulièrement sur les bandes horizontales supérieure et inférieure. À