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souvent, au milieu de belles œuvres, des négligences ou des oublis de ces principes.

Les verres employés par les artistes du XIIe siècle peuvent être classés ainsi :

Bleus[1] 
1o Bleu limpide légèrement turquoise.
2o Bleu saphir, mais verdissant.
3o Bleu indigo, intense.
4o Bleu azuré, très-clair, gris de lin.
Jaunes 
1o Jaune-paille, fumeux.
2o Jaune safran ou or bistré.
Rouges 
1o Rouge non doublé, orangé très-doux et égal de ton.
2o Rouge intense, jaspé.
3o Roux clair, fumeux.
Verts 
1o Vert jaune, limpide.
2o Vert-émeraude. Ce ton, à la main, paraît se rapprocher plutôt du gris que du vert ; il prend son éclat à distance, et surtout par l’opposition des tons bleus et rouges.
3o Vert-bouteille. À la main, ce vert paraît froid ; il prend sa qualité comme le précédent.
Pourpres 
1o Pourpre clair, chaud.
2o Pourpre limpide, azuré.
3o Pourpre sombre, vineux.
4o Pourpre très-clair, fumeux, pour les chairs.
Tons rares 
1o Mordoré, couleur vin d’Espagne.
2o Vert sombre, chaud.
Blancs 
1o Blanc jaunâtre, fumeux.
2o Blanc gris, glauque.
3o Blanc nacré.

Toutes les opérations chimiques des verriers du moyen âge étant empiriques, le compte des imprévus, des variétés, était long. Théophile laisse assez comprendre que le hasard seul donnait certains tons, dont l’artiste savait profiter. La palette du verrier était ainsi très-étendue, et il ne faudrait pas prendre la classification que nous donnons ici comme absolue. Nous n’avons fait qu’indiquer les valeurs ; mais comme tonalité, ces valeurs présentent des variétés nombreuses. Le talent des verriers consistait surtout à ne jamais juxtaposer deux valeurs égales et à profiter avec un sentiment réel de coloriste des variétés tonales.

Nous l’avons dit déjà, tous ces tons, sauf le rouge, sont répartis dans la masse du verre, et non doublés, ainsi qu’on les fabriqua plus tard.

Cette palette composée, les verriers procédaient comme l’indique le

  1. Les verres bleus du XIIe siècle possèdent une qualité particulière et qui les fait reconnaître entre tous ceux des autres époques : c’est qu’ils paraissent bleus à la lumière de la lampe, tandis que ceux des époques postérieures passent au gris laqueux, au vert ou au violet. Cette observation nous a été suggérée par des peintres verriers, habiles praticiens, et l’expérience nous l’a confirmée.