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des deux loquets (voyez en B), puis on rabattait sur cette garde le poignet de peau. La cubitière, conique et garnie de cuir intérieurement débordant l’orle en festons, était fixée à la saignée par une courroie.

Les combinaisons adoptées pour ces arrière et avant-bras, pendant le cours du xive siècle, sont à l’infini : tantôt c’était une spallière qui descendait jusqu’au milieu de l’humérus ; tantôt c’était une série de cylindres posés sur un fond de peau ; tantôt c’était la cubitière qui s’allongeait jusqu’au milieu de l’avant-bras… Les tâtonnements ne pourraient être tous mentionnés, tant ils sont nombreux, jusqu’au moment où le brassard articulé est combiné, c’est-à-dire jusqu’à la fin du xive siècle. Nous ne faisons que mentionner ici les transformations principales de cette partie de l’armure. Parmi ces tâtonnements, il faut signaler un curieux document fourni par un des monuments de la ville de Gand. Il existait aux quatre angles supérieurs de la tour du beffroi de cette ville quatre statues ; l’une d’elles, qui existe encore et qui a été transportée dans une sorte de musée établi sous les galeries d’un cloître d’abbaye,nous montre un homme d’armes datant de la seconde moitié du xive siècle (fig. 3). Cet homme d’armes est complètement vêtu de peau, sauf les bras, qui sont garnis, de l’épaule au coude, d’une première pièce cylindrique largement échancrée au-dessus de la saignée, d’une seconde pièce emboîtant la première et couvrant l’épaule, d’une petite spallière en manière d’épaulette qui recouvre la seconde pièce. Une cubitière conique est attachée sous la première pièce. Ces plates devaient être rivées à la manche de peau, et leur ligne de jonction était masquée par l’épais gambison de peau qui couvrait la poitrine et descendait à la hauteur des genoux. L’habillement de tête est fait de peau, avec camail et fixé sur une cervelière de fer sous-jacente, au moyen d’une forte courroie passant dans des boucles de cuir rivées à cette cervelière de fer ; boucles qui traversaient le camail.

Lorsque les brassards articulés sont adoptés par les hommes d’armes régulièrement équipés, les pièces séparées dont nous nous occupons ne sont plus guère portées que par les gens de pied. Cependant l’auteur d’un petit traité relatif au vêtement militaire de 1440 à 1450[1] mentionne de la manière suivante cette armure des bras, comme étant simultanément adoptée avec celle qui se compose

  1. Ce traité est attribué à Antoine de la Salle ; il fait partie d'un recueil de la Biblioth. nation. des manuscr., sous le n°1997. Il a été publié par M. René de Belleval : Du costume militaire des Français en 1446 (Paris, 1866).