Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné du mobilier français de l'époque carlovingienne à la Renaissance (1873-1874), tome 5.djvu/374

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
[ ÉCU ]
— 346 —

si l’on passait le bras transversalement et horizontal, si on le passait suivant le grand axe. La guige était attachée aux deux rivets du haut, ainsi que le montre la figure. Quelquefois les enarmes sont posées en sautoir avec deux courroies parallèles au-dessous. Le bras passait dans ces deux courroies, et la main saisissait les courroies croisées, ainsi qu’on le voit en C. Ces écus étaient garnis de l’umbo. En E, est faite la section de l’écu sur ab.

Il n’est pas douteux que les écus ne fussent parfois richement ornés d’or, de pierreries, d’ouvrages délicats d’orfèvrerie. Sans parler du célèbre bouclier d’Achille décrit dans l’Iliade, Grégoire de Tours cite un bouclier d’or enrichi de pierres précieuses, d’une grandeur extraordinaire, dont Brunehaut fit présent au roi d’Espagne[1].

Dans les romans des xiie et xiiie siècle, il est question aussi d’écus ornés de pierreries :


« Il ot escu et hiaume, et son branc acéré,
« Et escu fort et roide, ja meillor ne verrés.
« XXIII. topaces i ot tous séélés ;
« Les esmaus ne les pieres ne puet nus hons nom brer[2]. »


« Mervilleus cop li done en l’escu d’asur bis,
« Que les flors et les pierres an fist aval saillir[3]. »


« Et fiert Rollant sus son escu devant,
« Que flors et piers en va jus abatant[4]. »

Voici même un bouclier qui, à l’instar de celui d’Achille, représente les signes du zodiaque, la mer, les vents, etc. :


« Au col li pendent .I. fort escu pesant,
« Paint à azur et à or gentement :
« Envirun l’urle current li quatre vent,
« Li duze signe et li meis ensement,
« Et de l’abisme i est le fundement,
« Et le ciel et la terre feit par compassement ;
« Dessus la boucle le soleil qui replent[5]. »

La boucle doit s’entendre ici comme l’umbo, qui servait originairement à river les courroies.

  1. Greg. Tur., Hist. Franc., lib. IX.
  2. Gui de Bourgogne, vers 2321 et suiv.
  3. Ibid., vers 2472 et suiv.
  4. Otinel, vers 461 et suiv.
  5. Otinel, vers 300 et suiv. (millieu du xiiie siècle)