Page:Visan - Paysages introspectifs, 1904.djvu/98

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Du moins tu bondiras sous l’ambiance tiède,
Ô mon âme esseulée en l’infini des temps,
Silencieuse, tel le vol de Ganymède,
Sans dire si ta vague est gelée au printemps !


Les rocs s’effriteront peut-être à ton orée :
Laisse ta vase au fond stagner, les népenthès
Jeter comme un pont sur ta candeur adorée,
Et marier leur flore aux cardes d’aloès.


Toi, tu continueras ta course échevelée,
Claire comme un miroir vierge de tout regard,
Fière comme un granit d’une tour crénelée
Où des guerriers vaincus ont émoussé leur dard.


Et calme par delà l’inachevé des Choses,
Libre enfin de ta digue, et tes bords écartés,
Ô belle, tu noieras tes avalanches roses
Dans le gouffre éternel d’où jaillit des clartés.