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UNE FEMME M’APPARUT…

vage mais ce serait un cauchemar bref, et, dans la joie du meurtre mystique, je l’étendrais sur le divan d’étoffe verte qui ressemble à un banc moussu. Je disposerais autour de son front le halo de ses pâles cheveux. Je mettrais dans ses mains des lys expiatoires, et j’effeuillerais sur son corps les roses qu’elle préfère, les roses blanches un peu vertes. Elle dormirait, un peu plus pâle que dans l’habituel sommeil. Et je l’aimerais, à cette heure surhumaine, plus que nul être n’a jamais osé aimer. Ce serait la Folie, avec ses exaltations et ses terreurs, et ses au-delà.

Je veillerais auprès d’elle jusqu’à l’aube. Je regarderais vaciller les cierges. L’azur de minuit remplirait les coins d’ombre… Les paupières de Vally bleuiraient étrangement. Et je dirais très-haut, comme un homme qui parle dans l’ivresse :

Je l’ai tuée !

Elle demeurerait à tout jamais ma virginale Prêtresse. Elle serait la blancheur de mes songes, l’Inaccessible et l’Internissable.