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UNE FEMME M’APPARUT…

« Ne peux-tu écouter San Giovanni, au lieu de nous infliger tes dissertations futiles sur les fous auxquels tu ressembles ?

— Ne crois pas me l’apprendre, Vally… »

… La portière se souleva. Dans un bruit de feuilles remuées, une Femme m’apparut. Mes yeux furent attirés par une chevelure de Mélisande, une irréelle et rouge chevelure de martyre. Elle avait le regard lointain des filles du Nord. En la voyant, j’éprouvai ce divin et terrible frisson que réveillent une statue, jaillissement de marbre radieux, un tableau nostalgique, un accord infini. Avec un trouble de toute l’âme, j’entendis son nom : Éva.

Ce ne fut qu’une Vision. La jeune fille nous quitta presque aussitôt. Le charme religieux de sa voix grave persistait en moi.

Nous nous tûmes après son départ. L’ombre semblait plus mystérieuse. L’effluve de cet être inexprimable imprégnait l’atmosphère. Il y avait en Éva et autour d’elle une solennelle douceur.

Vally et la poétesse se remirent à causer,