Page:Vivien - Une femme m’apparut, 1904.djvu/209

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
217
UNE FEMME M’APPARUT…

Je la regardai jusqu’au fond de ses yeux bleus de tout le printemps qui s’y reflétait.

« Si vous vouliez mettre dans la mienne votre main de fillette sans défiance, Dagmar, j’irais respirer auprès de vous l’air de l’aurore. »

Ses prunelles trop claires ne fléchirent point sous mes prunelles sombres d’épouvante et de désir. Et, dans sa candeur perverse, elle tendit vers moi ses lèvres savantes, ses lèvres ingénues.

« Ne crains-tu rien, Dagmar ? »

Ma voix déchira les voiles légers, que le silence venait de tisser autour de nous.

« Que pourrais-je craindre ?

— Mon amour.

— Faut-il craindre l’amour ? » demanda-t-elle, si simplement que, devant le baiser qu’elle m’offrait, je reculai… Je reculai comme un être que la démence a frappé à demi recule devant le meurtre conçu en une heure insensée.

Je pris entre mes mains ses mains frêles.

« N’as-tu point peur de mes mains, Dagmar ?