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UNE FEMME M’APPARUT…

Moi, je parlais à voix basse, en me rapprochant d’Ione.

« Ne pense plus, ma trop méditative Amie. Ne pense plus, je t’en conjure au nom de notre très ancienne tendresse. Aime quelqu’un, aime quelque chose. L’amour est moins périlleux que la pensée. Je sais quelle hallucination te tourmente. Le Mystère du monde inexplicable te hante perpétuellement. J’ai connu ces tortures devant l’Inconnu. Pour échapper à la mortelle obsession, je me créai jadis une théorie de l’Univers qui a, du moins, le mérite d’une extrême simplicité. Je crois que l’Innommable, que l’Incompréhensible est une pensée double, une pensée hermaphrodite. Tout ce qui est laid, injuste, féroce et lâche, émane du Principe Mâle. Tout ce qui est douloureusement beau et désirable émane du Principe Femelle.

« Les deux Principes sont également puissants, et se haïssent d’une haine inextinguible. L’un finira par exterminer l’autre, mais lequel des deux remportera la victoire finale ? Cette