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Page:Voiture - Lettres, t. 1, éd. Uzanne, 1880.djvu/261

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fondre sur la Picardie, qu’elle trouve à descouvert, toutes nos armes estant occupées ailleurs. Ils prennent d’abord la Capelle et le Castelet ; ils attaquent et prennent Corbie en neuf jours. Les voila maistres de la rivière. Ils la passent, ils ravagent tout ce qui est entre la Somme et l’Oise ; et, tant que personne ne leur résiste, ils tiennent courageusement la campagne, ils tuent nos païsans et bruslent nos villages. Mais, sur le premier bruit qui leur vient que Monsieur s’avance avecque une armée et que le roy suit de près, ils se retirent, ils se retranchent derrière Corbie, et, quand ils apprennent que l’on ne s’arreste point et que l’on marche à eux teste baissée, nos conquerans abandonnent leurs retranchemens. Ces peuples si braves et si belliqueux, et que vous dites qui sont nez pour commander à tous les’autres, fuient devant une armée qu’ils disoient estre composée de nos cochers et de nos laquais, et ces gens si déterminez, qui dévoient percer la France jusques aux Pyrénées, qui menaçoient de piller Paris et d’y venir reprendre jusques dans Nostre-Dame les drappeaux de la bataille d’Avein, nous permettent de faire la circonvallation d’une place qui leur est si importante, nous donnent le loisir d’y faire des forts, et en suite de cela nous la laissent attaquer et prendre par force à leur veuë ! Voila où se sont terminées les bravades de Picolomini, qui nous envoyoit dire par’ses trompettes tantost qu’il souhaittoit que nous eussions de la poudre, tantost qu’il nous vinst de la cavalerie ; et, quand nous avons eu l’un et l’autre, il s’est bien gardé de nous