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CHAPITRE XII.

régit la terre, sur quels principes jugera-t-il les nations avant le prophète, tant de peuples qui buvaient du vin, mangeaient du porc, n’allaient point à la Mekke, à qui cependant il fut donné d’élever des empires puissants ? Comment jugeat-il les Sabéens de Ninive et Babylone ; le Perse, adorateur du feu ; le Grec, le Romain idolâtres ; les anciens royaumes du Nil, et vos propres aïeux, Arabes et Tartares ? Comment juge-t-il encore maintenant tant de nations qui méconnaissent ou ignorent votre culte, les nombreuses castes des Indiens, le vaste empire des Chinois, les noires tribus de l’Afrique, les insulaires de l’Océan, les peuplades de l’Amérique ?

« Hommes présomptueux et ignorants, qui vous arrogez à vous seuls la terre ! si Dieu rassemblait à la fois toutes les générations passées et présentes, que seraient, dans leur océan, ces sectes soi-disant universelles du chrétien et du musulman ? Quels seraient les jugements de sa justice égale et commune sur l’universalité réelle des humains ? C’est là que votre esprit s’égare en systèmes incohérents, et c’est là que la vérité brille avec évidence ; c’est là que se manifestent les lois puissantes et simples de la nature et de la raison : lois d’un moteur commun, général ; d’un Dieu impartial et juste, qui, pour pleuvoir sur un pays, ne demande point quel est son prophète ; qui fait luire également son soleil sur toutes les races des