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CHAPITRE XXII.

objets physiques, et ont été, dans l’entendement de l’homme, le produit de ses sensations, de ses besoins, des circonstances de sa vie et de l’état progressif de ses connaissances.

« Or, de ce que les idées de la divinité eurent pour premiers modèles les êtres physiques, il résulta que la divinité fut d’abord variée et multiple, comme les formes sous lesquelles elle parut agir : chaque être fut une puissance, un génie ; et l’univers pour les premiers hommes fut rempli de dieux innombrables.

« Et de ce que les idées de la divinité eurent pour moteurs les affections du cœur humain, elles subirent un ordre de division calqué sur ses sensations de douleur et de plaisir, d’amour ou de haine ; les puissances de la nature, les dieux, les génies furent partagés en bienfaisants et en malfaisants, en bons et en mauvais ; et de là l’universalité de ces deux caractères dans tous les systèmes de religion.

« Dans le principe, ces idées analogues à la condition de leurs inventeurs, furent long-temps confuses et grossières. Errants dans les bois, obsédés de besoins, dénués de ressources, les hommes sauvages n’avaient pas le loisir de combiner des rapports et des raisonnements : affectés de plus de maux qu’ils n’éprouvaient de jouissances, leur sentiment le plus habituel était la crainte, leur théologie la terreur ; leur culte se bornait à quelques