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CHAPITRE XXII.

concentration de toute science et de toute instruction dans quelques familles, qui, s’en arrogeant le privilège exclusif, prirent un esprit de corps et d’isolement funeste à la chose publique. Par cette succession continue des mêmes recherches et des mêmes travaux, le progrès des connaissances fut à la vérité plus hâtif ; mais par le mystère qui l’accompagnait, le peuple, plongé de jour en jour dans de plus épaisses ténèbres, devint plus superstitieux et plus asservi. Voyant des mortels produire certains phénomènes, annoncer, comme à volonté, des éclipses et des comètes, guérir des maladies, manier des serpents, il les crut en communication avec les puissances célestes ; et pour obtenir les biens ou repousser les maux qu’il en attendait, il les prit pour ses médiateurs et ses interprètes ; et il s’établit, au sein des États, des corporations sacrilèges d’hommes hypocrites et trompeurs, qui attirèrent à eux tous les pouvoirs ; et les prêtres, à la fois astronomes, théologues, physiciens, médecins, magiciens, interprètes des dieux, oracles des peuples, rivaux des rois, ou leurs complices, établirent, sous le nom de religion, un empire de mystère et un monopole d’instruction, qui ont perdu jusqu’à ce jour les nations… »

À ces mots, les prêtres de tous les groupes interrompirent l’orateur ; et jetant de grands cris, ils l’accusèrent d’impiété, d’irréligion, de blas-